halshs-05354372 Nomination de militants environnementalistes : déréalisation, tension, effets (…)

Ma contribution se centre sur les modes de nomination et de qualification dépréciatifs, voire insultants de militants environnementalistes en France, dans un contexte français contemporain où les enjeux écologiques s'amplifient tout en se médiatisant davantage. On trouve ainsi notamment, à propos de ces militants, les expressions dépréciatives ayatollah vert, khmer vert. Parallèlement, dans un commentaire prononcé en réaction à une manifestation contre des mégabassines en octobre 2022, la parole politique du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin associe à ces expressions celles d'écoterrorisme et écoterroriste, d'ultra-gauche et de zadiste, basées sur un vocabulaire qui joue des ressorts de la crainte de l'extrême. En s'étendant au-delà du strict domaine de l'écologie, ces qualifications visent des activistes et opposants politiques de manière englobante et en donnent délibérément une représentation péjorative, dramatisante, mais aussi déconnectée de la réalité. C'est cette pratique de déréalisation de la part du ministre que nous analysons dans un premier temps, à partir des mots qu'il emploie. Cet événement discursif et l'emploi de ces expressions prennent place dans une période pleine de contrastes et même de paradoxes dans lesquels durable et vert (au sens de « écologique ») sont a priori positifs et consensuels mais où vert peut, selon les contextes, changer de pôle, d'un point de vue axiologique. C'est ce qu'on observe avec les appellatifs et qualificatifs ayatollah vert, khmer vert, dès lors que le « vert » est jugé excessif en s'étendant à l'ensemble de la vie politique, économique et sociale.